Mai 2023, Le Groupement Herpétologique et Arachnide de Lausanne (GHAL) fête ses 30 ans et organise une expédition de 3 jours au Tessin pour partir à la recherche de son herpétofaune unique en Suisse. Composé d’une fine équipe de biologistes, ingénieurs en gestion de la nature, experts en reptiles et amphibiens ainsi que autres passionnés de nature, nous prenons la route direction notre camp de base : Bellinzona.
Après une bonne journée à nourrir les moustiques dans les marais tessinois et observer quelques reptiles et amphibiens locaux (et des tortues aquatiques un peu moins locales), j’ai rejoins en début de soirée un petit groupe motivé à trouver l’Argyronète aquatique.
Il s’agit d’une araignée qui a la particularité de se déplacer sous l’eau grâce à une bulle d’air et y construire son nid. Après un peu plus d’une heure de recherche infructueuse dans les marais inondés, nous rebrousserons malheureusement chemin bredouille.
Grand bien nous en fasse puisque nous trouverons notre premier orvet de Vérone au bord du chemin du retour. Bien entendu je n’avais pas pris l’appareil photo et j’ai dû me contenter du téléphone.
C’est une espèce de lézard (et oui ce n’est pas un serpent) exclusivement présente au Tessin pour la Suisse. La queue (qui peut se sectionner en cas de danger) fait environ la moitié du corps ou plus comparée à celle du serpent qui est très courte. De plus il a des paupières et la tête fait la largeur du corps en plus de ne pas pouvoir s’élargir au niveau de la mâchoire comme un serpent.
Suite et fin de cette première journée au Tessin. Après être sorti des marais et avoir mangé dans un bon grotto, nous avons fait ce qui était le plus sensé : monter une mission rainette et retourner dans les marais à 23h30.
Équipé de lampe frontale et bottes, nous n’avons pas mis longtemps à localiser la petite bête vu qu’au moins une bonne cinquantaine de mâles chanteurs donnaient de la voix. En pleine parade amoureuse les mâles se placent en hauteur sur des plantes, arbustes, branches, etc… près d’un point d’eau et utilisent leur sac vocal pour attirer les femelles. Ils continuent ainsi sans pratiquement s’arrêter chaque nuit jusqu’à la fin de la saison des amours. Ils peuvent alors perdre jusqu’à 30% et plus de leur poids.
Classée espèce à part entière depuis peu, la rainette de Perrin a longtemps été confondu avec Hyla intermedia et n’est présente que au Tessin pour la Suisse.
Une lampe frontale a été utilisée pour la photo, mais j’ai essayé de la tenir à bonne distance et la tamiser au mieux pour ne pas trop déranger la rainette.
Deuxième journée de cette sortie au Tessin, nous partons au fond d’un vallon pour tenter d’observer une nouvelle espèce de lézard découverte en 2018 en Suisse et mise en lumière en 2021 : Zootoca carniolica.
Du même genre que le lézard vivipare (qui est d’ailleurs plutôt ovovivipare), carniolica est cependant plutôt ovipare pour sa part. C’est à dire qu’il pond des œufs.
Malheureusement la chance ne nous sourira pas cette fois et après une matinée de recherche, le petit lézard et les vipères resteront bien cachés. Nous trouverons quand même quelques orvets de Vérone et des lézards des murailles maculiventris qui sont une sous-espèce qui ne se trouve que au Tessin en Suisse.
La végétation est très différente de celle que nous avons l’habitude de voir dans les Alpes valaisannes et le Jura. Le milieu est parfaitement structurés pour les reptiles et amphibiens avec des cours d’eau, la lisière de la forêt, de nombreux pierriers ainsi que des petits buissons et arbustes. Le tout entouré de prairies alpines riches en plantes et insectes.
La pluie nous ayant chassé de la montagne, nous sommes allés passer l’après-midi de cette deuxième journée en bord de rivière. Comparé à chez nous les zones alluviales sont encore bien présentes et offre un milieu propice à beaucoup d’espèces de reptiles et amphibiens.
Les lézards verts, couleuvres vertes et jaunes et grenouilles vertes étaient bien présents, mais cette fois j’arrêterai mon objectif sur cette petite araignée sauteuse : la saltique orangée.
En général, c’est une bonne candidate pour faire apprécier nos amis arachnides aux gens de part sa morphologie plutôt mignonne et sympathique et sa petite taille.
Comme mentionné précédemment, les lézards vert étaient aussi de la partie lors de cette sortie du 2ème après-midi et ce beau mâle avec sa gorge bleue a bien voulu prendre la pose pour nous sur sa branche. Bien que terrestres, ils sont également capables de grimper un peu pour s’exposer plus facilement au soleil.
3ème jour. Après toutes ces aventures, il est malheureusement temps pour nous de rentrer à la maison en passant par l’Italie avant de rejoindre le Valais. Nous faisons cependant une halte en route pour fouiller une rivière prometteuse pour le crapaud vert (Bufotes viridis). Celui-ci a maintenant disparu de Suisse et nous ne voulons pas rater une occasion potentielle de l’observer, surtout que nous sommes à ce moment en pleine période de ponte pour cette espèce. Notre première rencontre sera cependant cette couleuvre tessellée de bonne taille qui, comparé à la suisse romande, n’est pas invasive dans la région (au Tessin non plus d’ailleurs).
Toujours en quête de notre crapaud vert le long de cette rivière, quelle ne fût pas notre surprise de tomber nez à nez avec un scorpion ! Heureusement, pas de danger de mort ici, juste l’équivalent d’une piqûre de guêpe. Ce petit scorpion de 4-5cm se trouve également chez nous ainsi que potentiellement encore 5 autres espèces. D’ailleurs vous saviez que les scorpions étaient fluorescents ? Sous certaines longueurs d’ondes du spectre lumineux, les scorpions sont capables d’émettre une fluorescence grâce à des molécules spécifiques contenues dans leur exosquelettes. C’est pourquoi si vous les éclairez avec une lampe ultraviolette, ils prendront une couleur bleu fluorescente.
Dernière photo de cette magnifique excursion. Au final le crapaud vert ne se sera pas montré, toutefois nous aurons quand même pu observer une de ses pontes. Signe que l’endroit était bel est bien propice à l’espèce. Mais notre chance ne s’arrêtera pas là, car en reprenant la route nous sommes tombés sur un couple de Huppes fasciées s’affairant dans la prairie à proximité. Pris au dépourvu et pas camouflé, j’arriverais cependant à discrètement sortir de la voiture, prendre l’appareil photo et me glisser derrière un arbre pour prendre cette photo d’un des 2 individus sans qu’il ne s’envole. Quelle belle manière de conclure cet arrêt en Italie avant de reprendre la route pour la maison.